
Les crèches rapport de l’IGAS
Jeudi 11 mai 2023, Véronique ESCAMES, co-secrétaire générale du SNPPE, est intervenue sur le plateau du 18h30 de France 3 Paris Ile de France, suite à la publication du rapport de l’IGAS.
Jeudi 11 mai 2023, Véronique ESCAMES, co-secrétaire générale du SNPPE, est intervenue sur le plateau du 18h30 de France 3 Paris Ile de France, suite à la publication du rapport de l’IGAS.
En mai 2021, suite à la constatation de blessures sur le corps de son enfant lui faisant suspecter de potentielles maltraitances dans une crèche du groupe People & Baby à Villeneuve d’Ascq, une maman dépose plainte. Deux professionnelles de la structure sont alors renvoyées devant le tribunal correctionnel pour des faits de violences physiques et psychologiques n’ayant pas entraîné d’incapacité temporaire de travail sur un mineur de moins quinze ans par une personne ayant autorité sur la victime en adoptant des attitudes et gestes inadaptés à la prise en charge d’un enfant en bas âge. D’autres parents d’enfants accueillis au sein de la même crèche ont alors rejoint la procédure, pour d’autres faits dont leurs enfants auraient potentiellement été victimes. Le procès se tiendra le 15 mai prochain à 14h au tribunal correctionnel de Lille.
Suite au décès d’un bébé dans le même groupe, elle crée un an plus tard le collectif “protection enfance crèche (CPEC)” et appelle les parents de victimes à la rejoindre. De cet appel, elle recevra des centaines de témoignages des quatre coins de la France.
Après le drame de Lyon l’année dernière, après le rapport de l’IGAS rendu public le 11 avril 2023, la FNEJE et le SNPPE souhaitent apporter leur soutien à ces parents. Dénoncer des faits de maltraitance n’est jamais une chose facile, que l’on soit parent ou professionnel·le de la petite enfance. Ces situations viennent mettre en lumière “ l’insupportable ”, le “ non-imaginable ”. Malheureusement de nombreuses plaintes sont classées sans suite et lorsqu’elles sont retenues, les peines prononcées sont souvent minimales. Malgré la loi du 30 novembre 2018 qui inscrit dans le code civil que “ l’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques “, notre société ne veut toujours pas admettre que les enfants sont des citoyens à part entière et que leur éducation doit se faire sans violence que ce soit au sein de la famille ou dans les institutions qui les accueillent (crèches, assistant.es maternel.les, écoles, accueils périscolaires, clubs sportifs, etc.).
En ce qui concerne les modes d’accueil de la petite enfance, on ne peut plus dire qu’on ne savait pas. Que ce soit dans les cas de maltraitance institutionnelle que l’IGAS démontre dans son rapport et qu’il n’est plus possible de minimiser ou parfois des cas de maltraitance individuelle, la FNEJE et le SNPPE encouragent les professionnel.les et les parents dans la mise en exergue des faits de maltraitance afin que les politiques publiques prennent enfin la mesure des enjeux et apportent les réponses adéquates.
De façon générale, c’est toute la société qui doit prendre conscience que notre regard sur l’enfant doit changer.
Après avoir affirmé « à la racine des difficultés relatées par l’IGAS il y a une maltraitance institutionnelle attisée par des décisions des pouvoirs publics depuis ces 20 dernières années », le collectif Pas de bébés à la Consigne s’adresse, dans son communiqué du 10 mai, en ces termes à Elisabeth Borne et Jean-Christophe Combe : « Avec l’analyse de la situation et les préconisations de la mission IGAS vous avez les cartes en mains. Les racines du mal ne seront pas réduites en un jour, par contre il est de votre responsabilité de prendre maintenant les mesures concrètes qui redresseront la situation à échéance de la prochaine Convention d’Objectifs et de Gestion (Cog) avec la CNAF ». Le temps presse donc selon Pas de bébés à la consigne, qui exhorte le gouvernement à ne pas rater le coche.
Source : Rapport IGAS sur les crèches : Pas de bébés à la consigne appelle à des mesures rapides et concrètes
À la suite du rapport de l’Igas, le ton des organisations représentatives a changé. Auparavant centrées sur les conditions de travail et d’accueil et longtemps réticentes à pointer les situations de maltraitance, par crainte d’une stigmatisation des professionnels qu’elles représentent, elles n’hésitent plus utiliser à les nommer telles quelles.En témoigne aussi le soutien du Syndicat national des professionnels de la petite enfance (SNPPE) et de la Fédération nationale des éducateurs de jeunes enfants (FNEJE), non pas à des professionnels, mais à des parents qui seront en procès contre deux salariées du groupe de crèche People & baby le 15 mai prochain au tribunal correctionnel de Lille.
Source : Petite enfance : des annonces « fortes » attendues | Lassmat.fr
Anciennement directrice puéricultrice de crèche pendant plus de 17 ans, je suis adjointe de direction dans le domaine RH depuis 12 ans dans une Association qui gère 5 EAJE de 54 à 60 places avec 140 salariés. J’ai vu évoluer de manière générale le secteur de la petite enfance et de la crèche dans le sens du libéralisme et de la rentabilisation, depuis notamment l’instauration de la PSU et de l’entrée des crèches dans le secteur marchand. Sincèrement, il y a 18 ans, lorsque les crèches sont entrées dans le secteur marchand et à la vue des effets de la privatisation sur les établissements à vocation sociale ou de soins que nous constations déjà à cette époque (clinique, Ehpad,…), je projetais que les crèches allaient suivre la même triste destinée et transformation. Je ne me doutais pas à quel point ! Je réalise entre 80 et 100 entretiens de recrutements par an dont le nombre n’a cessé d’augmenter depuis 2017, qui est pour moi l’année où j’ai réellement senti la très forte pénurie de personnel. J’ai rencontré des professionnel-le-s diplômé-e-s (Puéricultrice, EJE, AP CAP AEPE) dont le niveau de connaissance et du sens du métier pour certain-es est extrêmement inquiétant. Nombreux sont les professionnel-e-s qui rapportent lors de l’entretien de recrutement les situations évoquées dans le rapport de l’IGAS. Mais comme vous le dites, le secteur professionnel de la petite enfance a essayé de se faire entendre depuis longtemps et en attendant, il continue à subir et les enfants avec !
Je suis en total accord avec toutes les réclamations de ce rapport, je dirais plutôt les urgentes nécessités, pour rendre aux crèches leurs missions première : Accompagner, soutenir et Prévenir, et aux professionnels les moyens de les mettre en œuvre. Si je peux me permettre, je pense que dans les réclamations, on ne parle pas de l’essoufflement, voir l’épuisement , vécu par les directeurs-rices des EAJE. Je constate dans le monde des crèches des responsables de crèches qui sont écrasés par une réglementation de plus en plus contraignante, par des exigences d’activité difficile à réaliser (pour arriver seulement à l’équilibre budgétaire, et pas pour faire du bénéfice !). En effet, ils / elles doivent atteindre un nombre d’heures payées par les familles (lui-même obligatoirement cohérent avec les heures de présence des enfants) dans un système insuffisamment prévisible et très instable avec les absences des enfants pratiquement remboursées et qu’il faudra remplacer ou surbooker + la pénurie de personnel pour remplacer les salariés absents (absentéisme croissant) ou les postes de titulaires. Et bien sûr, tout cela en gardant en tête les valeurs et les fondements des projets d’établissement. Impossible quadrature du cercle ! Ces directeurs passent beaucoup trop de temps à faire et refaire le plannings (parfois sur leur temps personnel !) des professionnel-e-s et celui des enfants, les amenant à proposer certains créneaux libérés à des familles ou à de l’accueil occasionnel. Ils /elles passent du temps à contrôler, mettre en place toujours plus de procédures ou des protocoles de sécurité, d’hygiène, de plus en plus strict et coûteux et à tous les niveaux. Ils/Elles vivent avec une machine à calculer clouée dans la main et l’angoisse vissée au ventre, et bien entendu en gardant le sourire, la motivation et l’investissement . Ils/elles sont de plus en plus happé-e-s par de multiples fonctions et s’éloignent de + en + du terrain pour faire le vrai fond de leur travail : observer le travail des professionnels, évaluer les pratiques, s’entretenir avec eux / elles, reprendre des situations, construire ensemble et soutenir les projets des équipes, avoir le temps de vrais échanges collectifs avec les équipes et les parents…